Steen Sustainable Energy, la start-up qui veut mettre fin au gaspillage thermique
Fondée en 2020, la jeune entreprise lausannoise veut bousculer les codes du chauffage et du refroidissement des bâtiments à l’aide d’un concept : l’anergie.
Fondée en 2020, la jeune entreprise lausannoise veut bousculer les codes du chauffage et du refroidissement des bâtiments à l’aide d’un concept : l’anergie.
À l’heure où la transition énergétique impose de repenser les modèles traditionnels, une jeune pousse vaudoise s’est donnée pour mission de transformer la manière dont les bâtiments produisent et consomment de l’énergie. Créée en 2020, Steen Sustainable Energy SA veut bousculer les codes du chauffage et du refroidissement des bâtiments à l’aide d’un concept : l’anergie.
« Le principe de l’anergie peut se résumer assez simplement : récupérer les rejets thermiques jusqu’ici inutilisés et les transformer en nouvelle source d’énergie », explique Boris Clivaz, actionnaire de Steen et CEO de GEFISWISS. Selon lui, cette approche constitue une alternative crédible à la géothermie ou au chauffage à distance.
« En récupérant la chaleur du sol, de l’air extrait des logements ou encore des parkings, cette boucle stocke l’énergie quand elle est disponible et la restitue lors des pics de demande », détaille Romain Chauvet, ingénieur et chef de projet.
L’innovation phare de la jeune société : un système énergétique multisource capable de fournir chaleur, eau chaude sanitaire et rafraîchissement, tout en réduisant la consommation électrique et en supprimant le recours aux énergies fossiles. Il repose sur une boucle de stockage thermique dynamique : un tuyau monotube enterré sous les bâtiments, non isolé et jouant le rôle de batterie thermique.
« En récupérant la chaleur du sol, de l’air extrait des logements ou encore des parkings, cette boucle stocke l’énergie quand elle est disponible et la restitue lors des pics de demande », détaille Romain Chauvet, ingénieur et chef de projet. Contrairement aux sondes géothermiques classiques, ce dispositif low-tech ne nécessite ni forage profond ni isolation des conduites enterrées, ce qui le rend beaucoup plus économique et simple à installer.
Associé à des pompes à chaleur adaptées et à un algorithme intelligent, ce système atteint un rendement de 3,5 à 5 kWh thermiques pour 1 kWh électrique consommé. « L’un des atouts majeurs de cette technologie est son intégration avec le solaire photovoltaïque. Grâce à sa capacité de stockage, elle permet de lisser la production et de doubler l’autoconsommation, répondant ainsi à l’un des grands défis actuels : éviter la saturation des réseaux électriques”, assure Romain Chauvet.
« La prochaine étape sera d’intégrer l’intelligence artificielle pour anticiper la demande en fonction de la météo ou des habitudes de consommation », précise Boris Clivaz, actionnaire de Steen et CEO de GEFISWISS.
La société a déjà plusieurs projets concrets à son actif, aussi bien dans le logement collectif que dans l’industrie. Steen a par exemple déjà équipé plusieurs ateliers industriels où la chaleur générée par les machines est captée, plutôt que rejetée dans l’air. Même logique dans la grande distribution : dans un premier supermarché Migros, la chaleur dégagée par les réfrigérateurs est désormais utilisée pour produire l’eau chaude sanitaire des logements voisins, plutôt que de s’échapper inutilement sur les toits. Autant d’exemples qui illustrent le potentiel de la technologie : transformer chaque bâtiment en producteur d’énergie et valoriser des flux jusqu’ici gaspillés.
Steen Sustainable Energy SA a déjà investi 3 millions de francs pour développer sa technologie, déposé deux brevets et noué plusieurs partenariats académiques, notamment avec l’EPFL et la HES Lucerne. « La prochaine étape sera d’intégrer l’intelligence artificielle pour anticiper la demande en fonction de la météo ou des habitudes de consommation, optimiser les circuits hydrauliques et améliorer encore les performances de 20 à 30 % », précise Boris Clivaz.
L’un des grands défis à venir pour Steen sera le bâti existant. Déployée principalement dans des projets de construction neuve, sa solution doit encore être adaptée afin de pouvoir s’ouvrir à la rénovation. Consciente du défi, l’entreprise y travaille déjà en réfléchissant par exemple à reconvertir d’anciennes cuves à mazout en réservoirs thermiques. En parallèle, Steen travaille également déjà sur la conception d’une pompe à chaleur mieux adaptée à sa technologie.
Avec cinq collaborateurs — ingénieurs, automaticiens et chefs de projet — Steen a pour ambition de passer du statut de start-up à celui de scale-up. Rentable dès 2024, elle cherche ainsi de nouveaux financements pour accélérer son industrialisation et élargir son champ d’action. Car l’ambition dépasse le bâtiment : à terme, Steen imagine des zones industrielles chauffant les quartiers environnants grâce à leur chaleur fatale, ou encore des systèmes urbains capables de remplacer avantageusement les chauffages à distance alimentés au gaz.