Entre ambitions et réalités : l’Europe face aux défis du recyclage des batteries

« Le recyclage apparaît dès lors comme une solution pour renforcer la souveraineté européenne : il permettrait de sécuriser l’approvisionnement de l’industrie tout en limitant l’ouverture de nouvelles mines », explique Valentin Vigier pour La Financière de l’Échiquier.

Entre ambitions et réalités : l’Europe face aux défis du recyclage des batteries
Valentin Vigier, Responsable Recherche Investissement Responsable, La Financière de l’Échiquier (LFDE).

La faillite récente de Northvolt, champion suédois de la batterie pour véhicules électriques, après celle de Britishvolt en 2023, met en lumière les difficultés auxquelles l’Europe se heurte pour développer une filière pourtant essentielle à ses ambitions d’électrification et de souveraineté. L’émergence d’une filière de recyclage exige des investissements massifs, et le financement de l’innovation technologique sera décisif pour rester compétitif à l’échelle internationale.

L’idée semble pourtant simple. À l’heure où la transition énergétique s’accélère, le recyclage des batteries en Europe constitue un enjeu majeur. Avec l’essor des véhicules électriques et des dispositifs de stockage d’énergie, la demande en lithium, cobalt et nickel explose. Entre 2017 et 2022, la consommation mondiale de lithium a ainsi plus que triplé, celle de cobalt a augmenté de 70 % et celle de nickel de 40 %, selon le « Global Critical Minerals Outlook » de l’AIE (mai 2025).

Or, l’Europe dépend entièrement des importations de ces métaux rares, dont l’extraction, et surtout le raffinage, sont très largement contrôlés par la Chine. Le recyclage apparaît dès lors comme une solution pour renforcer la souveraineté européenne : il permettrait de sécuriser l’approvisionnement de l’industrie tout en limitant l’ouverture de nouvelles mines, dont l’impact environnemental local pourrait être considérable.

Pour réduire cette dépendance, l’Union européenne a mis en place une réglementation stricte. Depuis 2023, le règlement sur les batteries et leurs déchets fixe des objectifs précis de collecte et de valorisation. À partir de 2028, 50 % du lithium et 90 % du cobalt et du nickel contenus dans les batteries devront être recyclés. Le texte impose également des niveaux minimaux obligatoires de contenu recyclé dans les nouvelles batteries industrielles. Ce cadre poursuit un double objectif : créer un marché du recyclage attractif pour les industriels et instaurer un cycle vertueux de production et de consommation.

Défis Technologiques et Économiques

Le recyclage des batteries est un processus complexe et coûteux qui pose plusieurs défis. Le premier concerne la disponibilité de la matière première pour alimenter les usines : il existe en effet un décalage d’environ dix ans entre la mise en production d’une batterie et sa fin de vie, ce qui oblige les premières unités de recyclage à fonctionner essentiellement avec des rebuts industriels.

À cela s’ajoute la filière des véhicules électriques, qui peine encore à décoller en Europe, freinée par des enjeux de compétitivité. Enfin, une incertitude demeure quant à la chimie dominante des batteries : nickel-cobalt-manganèse (NMC) ou lithium-fer-phosphate (LFP). Or, la valeur résiduelle de ces deux types de batteries varie du simple au double, voire au triple.

Si les défis restent considérables — comme en témoignent l’abandon ou le report de financements de grands projets portés par Suez, Eramet, Stellantis ou encore Orano — certains acteurs s’emparent néanmoins de ces enjeux pour faire progresser la filière et s’engager dans une économie circulaire vertueuse.

En juin 2025, la start-up française Battri a ainsi inauguré son premier site de recyclage. Son objectif : extraire des batteries la « black mass », une poudre noire composée de minéraux et de métaux. Ce matériau constitue le premier maillon du processus de recyclage : il est ensuite revendu à des industriels pour être raffiné et réintégré dans la fabrication de nouvelles batteries.

Grâce à leur structure de coûts optimisée et à leur réactivité opérationnelle, les start-up s’adaptent facilement aux fluctuations d’un marché encore naissant. Elles ne sont toutefois pas les seuls et des acteurs cotés développent eux aussi cette expertise. Véolia, spécialiste du traitement des déchets, dispose déjà de quatre sites capables de traiter jusqu’à 30 000 tonnes de batteries — soit près de 100 000 batteries de véhicules électriques — depuis la collecte jusqu’à l’affinage. Autre exemple : Derichebourg, qui a annoncé en mai un partenariat avec le fabricant coréen de batteries LG.

Le recyclage des batteries n’en est qu’à ses prémices, mais il constitue déjà un maillon essentiel de la transition énergétique. Accompagner les entreprises dans ce défi sera décisif.

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