Du 9 au 12 décembre, Building Bridges accueillera des participants venus de plus de cent pays. Entretien avec Patrick Odier, le président de la manifestation genevoise.
Alors qu'en Europe les esprits changent et que l'idée d'une TVA différenciée selon des critères environnementaux circule dans les hémicycles, Adèle Thorens Goumaz se demande si la Suisse ne devrait pas suivre le mouvement.
La difficile combinaison entre Biodiversité et essor des énergies renouvelables
Le plus grand défi de la Suisse sera de réussir à combiner ces trois objectifs sociétaux: l'action climatique, la sécurité énergétique et l'intégrité écologique.
Développer les énergies renouvelables tout en préservant la biodiversité est un enjeu fondamental en cette période où la Suisse se lance dans la construction de parcs solaires alpins. Entre juin 2023 et septembre 2024, soutenu par le Center for Climate Impact and Action de l'UNIL & EPFL (CLIMACT), un pôle de chercheurs, comprenant des experts du climat, des énergies renouvelables et de la biodiversité, s'est attelé à passer en revue toute la littérature scientifique publiée sur ces thématiques. Leur objectif était de déterminer comment combiner ces trois objectifs sociétaux clés : l'action climatique, la sécurité énergétique et l'intégrité écologique.
Si certains en doutent encore, les experts rappellent que la biodiversité de la Suisse est en danger. La diversité exceptionnelle d'écosystèmes et d'espèces du pays est insuffisamment protégée et de plus en plus menacée. Les causes du mal sont connues : l’agriculture industrielle, l’étalement urbain et la construction de routes (fragmentation, imperméabilisation des sols). Dans les zones alpines fragiles, les activités de transport et de construction causent également des dommages de plus en plus importants.
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L’autre élément, remis en perspective dans ce rapport, concerne les énergies renouvelables. Les auteurs rappellent que le déploiement à grande échelle des énergies renouvelables (ER) sera nécessaire pour éliminer progressivement les combustibles fossiles et parvenir à des émissions nettes nulles d'ici à 2050. « L'un des principaux défis consiste à combler le déficit énergétique hivernal, ce qui pourrait être réalisé au mieux grâce à l'énergie photovoltaïque (PV) et éolienne dans les Alpes, en complément de l'hydroélectricité existante et de l'énergie photovoltaïque en plaine, sur les infrastructures et les espaces utilisés de manière intensive. »
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On en vient au principal problème : comment combiner développement des énergies renouvelables sans trop de conséquences néfastes sur la biodiversité ? En effet, l’un ne va pas sans l’autre. Une biodiversité saine et des écosystèmes intacts contribuent à réguler notre climat, à atténuer le changement climatique et à fournir un large éventail d'autres services écosystémiques.
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Parmi les recommandations proposées dans le rapport, se démarque celle d’une approche coordonnée aux niveaux cantonal, national et international. « Les procédures de démocratie, de participation et de contrôle sont essentielles pour la légitimité des mesures de mise en œuvre de l'expansion des ER en Suisse. Ces procédures doivent être renforcées et non outrepassées au nom de l'urgence. Néanmoins, les procédures d'approbation doivent être considérablement rationalisées et accélérées. »
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Au niveau local, les experts jugent essentiel « d'impliquer les communautés pour réussir les transitions énergétiques et la protection de la biodiversité ». Quant au niveau national, ils appellent notamment à réévaluer la taille minimale des projets d'importance nationale afin de permettre l'inclusion de projets plus petits sur des sites moins critiques. Cela inclut, par exemple, de sélectionner soigneusement les sites accessibles sans nouvelles routes, en utilisant idéalement des sites déjà dégradés et en excluant les zones importantes pour la biodiversité.
À titre de conclusion, les experts de CLIMACT estiment qu’il ne suffira pas de réduire au minimum les impacts des nouvelles sources d’énergies durables, mais qu'il faudra également réduire les effets néfastes des activités humaines et des infrastructures existantes. « Cela implique d'arrêter et d'inverser les activités les plus nuisibles, et d'entreprendre une restauration écologique afin d'obtenir un gain net pour la biodiversité et d'atténuer ainsi le changement climatique. »
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