Touche pas à la CS3D : un impératif de responsabilité et de compétitivité pour l'Europe

« Affirmer la nécessité de supprimer la CS3D revient à ignorer une réalité de plus en plus prégnante : l'avenir de la compétitivité européenne est lié à l'adoption d'un capitalisme soutenable », expliquent François de Cambiaire et Lydia Méziani, avocats chez de Cambiaire & Méziani Associés.

Touche pas à la CS3D : un impératif de responsabilité et de compétitivité pour l'Europe
François de Cambiaire et Lydia Méziani, avocats chez de Cambiaire & Méziani Associés.

Le 19 mai dernier, la déclaration du président Macron évoquant une possible mise à l’écart de la directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (CS3D), aux côtés d’autres réglementations, a provoqué une onde de choc aux répercussions multiples. Si cette annonce a trouvé un écho favorable auprès de certains acteurs économiques réunis sous la bannière de Choose France, elle a, en parallèle, suscité une vive inquiétude et une opposition ferme de la part des défenseurs d’un entrepreneuriat responsable.

Pour ces derniers, la transition vers un capitalisme véritablement soutenable ne constitue pas une contrainte, mais bien une garantie fondamentale de compétitivité à long terme, ainsi qu’une transformation stratégique indispensable dans un monde en proie aux défis environnementaux et sociaux.

Défendre un capitalisme durable

Affirmer la nécessité de supprimer la CS3D revient à ignorer une réalité de plus en plus prégnante : l'avenir de la compétitivité européenne est intrinsèquement lié à l'adoption d'un modèle de capitalisme pleinement soutenable. La France, forte d’une tradition humaniste séculaire et pionnière en matière de responsabilité sociétale des entreprises — notamment avec l’adoption de sa loi novatrice sur le devoir de vigilance en 2017 — a déjà démontré que son tissu entrepreneurial est, dans sa grande majorité, prêt à embrasser cette transformation essentielle. C'est cette vision progressiste, garante des droits des générations futures et de la pérennité de notre modèle économique, que nos décideurs politiques se doivent de défendre et de promouvoir avec conviction.

La France, forte d’une tradition humaniste séculaire et pionnière en matière de responsabilité sociétale des entreprises a déjà démontré que son tissu entrepreneurial est, dans sa grande majorité, prêt à embrasser cette transformation essentielle.

Cette volte-face potentielle, vraisemblablement motivée par des considérations protectionnistes et la crainte d’un décrochage économique face à une concurrence internationale moins regardante sur les aspects environnementaux et sociaux, entre en contradiction flagrante avec les engagements européens et internationaux auxquels la France a pourtant souscrit (Accords de Paris sur le climat, pacte de Glasgow, principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme).

Une telle décision risquerait non seulement de ternir l’image et la réputation de l’Europe sur la scène mondiale en matière d’ambition climatique et sociale, mais aussi de compromettre gravement l’atteinte de ses objectifs environnementaux et sociaux à long terme. Paradoxalement, un tel recul réglementaire exposerait encore davantage les opérateurs économiques européens à des contentieux liés à des atteintes à l’environnement ou à des violations des droits humains, fragilisant ainsi leur sécurité juridique.

Risque de perte d'influence

Renoncer à ces initiatives européennes, c’est également se priver d’un levier d’influence géopolitique majeur. Le pouvoir normatif extraterritorial de l’Union européenne lui confère la capacité d’imposer des standards réglementaires ambitieux bien au-delà de ses frontières, érigeant de facto la directive sur le devoir de vigilance en un standard mondial de référence.

Cette capacité d’influence normative est non seulement essentielle pour garantir une concurrence plus équitable aux entreprises européennes — en évitant le dumping social et environnemental — mais elle constitue également un pilier fondamental de la souveraineté de l’UE face aux décisions unilatérales d’autres grandes puissances.

Dans le contexte géopolitique actuel, marqué par l’affaiblissement du multilatéralisme et l’exacerbation des tensions économiques, se priver d’un tel outil stratégique apparaît particulièrement contre-productif. La directive CS3D n’est pas un frein à l’activité économique, mais bien un cadre protecteur, garant d’une concurrence équitable entre tous les acteurs, et certainement pas une excuse pour l’inaction.

La France, comme l’ensemble des États membres de l’Union européenne, se trouve aujourd’hui face à un choix fondamental aux implications profondes : soit continuer à œuvrer pour l'établissement de standards réglementaires élevés et applicables également aux acteurs économiques non européens souhaitant accéder au marché intérieur — créant ainsi une dynamique d’harmonisation par le haut —, soit céder à la tentation d’abaisser leurs propres exigences domestiques dans une vaine course à la compétitivité de court terme, au risque de sacrifier leurs ambitions environnementales et sociales et de fragiliser leur modèle de développement à long terme.

Écarter la directive CS3D serait une erreur stratégique lourde de conséquences : un renoncement aux valeurs fondamentales de responsabilité et de durabilité qui fondent le projet européen.

Un rappel venu de Suisse

Face à ces divisions et à ces enjeux structurants, la récente condamnation historique de la Suisse par la Cour européenne des droits de l’homme — lui imposant des obligations positives en matière de lutte contre le changement climatique — ne devrait-elle pas résonner comme un puissant avertissement pour l'ensemble de l'Union européenne ? Cette décision de justice souligne avec force la responsabilité des États, et par extension celle des acteurs économiques, dans la protection des droits fondamentaux face aux menaces environnementales. Elle rappelle l'urgence d'agir et la nécessité de traduire les engagements politiques en mesures concrètes et contraignantes.

Écarter la directive CS3D serait une erreur stratégique lourde de conséquences : un renoncement aux valeurs fondamentales de responsabilité et de durabilité qui fondent le projet européen. Il est impératif que les dirigeants européens entendent la voix de celles et ceux qui croient en un avenir où la compétitivité économique rime avec responsabilité sociale et environnementale — un avenir où l’Europe assume pleinement son rôle de leader mondial en matière de transition écologique et de protection des droits humains.

Ne touchons pas à la CS3D : elle est un investissement essentiel pour l’avenir de notre compétitivité et de notre planète.

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