SwissPowerShift : Avenir et fêtes de fin d'année
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Entretien avec Jean-Jacques Morard, CEO et Administrateur délégué de la société immobilière deRham SA.
Chaque mois, nous interrogeons différents secteurs et professions sur des thématiques spécifiques.
Pour ce mois de novembre, nous sommes aller toquer à la porte des promoteurs et grands groupes immobiliers pour avoir leur point de vue sur une thématique particulièrement sensible ces jours à Berne : celle des subventions destinées à l'assainissement des bâtiments.
Les réponses de Jean-Jacques Morard, CEO et Administrateur délégué de la société immobilière deRham SA.
Un groupe d’experts nommé par le Conseil Fédéral propose de réduire drastiquement les subventions pour l'assainissement des bâtiments. Comment accueillez-vous cette idée ?
Au vu des enjeux climatiques et de leurs implications sur la rénovation énergétique des bâtiments, je ne comprends pas la proposition de ce groupe d'experts visant à réduire les subventions. Il me semble en effet crucial de mobiliser tous les leviers disponibles pour accélérer les mesures d'assainissement du parc immobilier suisse, et les subventions constituent un outil important pour soutenir cette dynamique.
Cette proposition, que je juge irresponsable, pourrait également annoncer une réduction progressive et proportionnelle des subventions avec la mise en place de nouvelles réglementations contraignantes, comme la récente loi vaudoise sur l'énergie. On peut craindre que, si la rénovation des bâtiments devenait obligatoire, l'État décide de renoncer aux aides incitatives !
Les experts argumentent que la plupart des solutions pour assainir sont déjà rentables et que, dans ce cas, les subventions ne font plus sens. Cet argument vous semble-t-il valable ?
Je me demande comment ces experts calculent la rentabilité des mesures d'assainissement énergétique des bâtiments. Dans la réalité, nous constatons que de tels investissements ne sont pas rentables ou présentent une rentabilité si faible qu'elle ne suffit pas à inciter les propriétaires à réaliser des travaux.
Les restrictions imposées par le droit public (comme la L3PL vaudoise) combinées aux limitations de droit privé (notamment le droit du bail et l'article 14 OBLF) conduisent invariablement au même constat : les rénovations énergétiques ne garantissent pas une rentabilité satisfaisante pour les propriétaires.
Les seules rénovations énergétiques que nous avons menées et qui génèrent un rendement acceptable concernent des bâtiments permettant d'augmenter les surfaces locatives, par exemple grâce à des surélévations.
Bien que je sois habituellement favorable à la déréglementation et à une politique libérale, je suis convaincu que seule l'imposition de délais d'assainissement raisonnables mais contraignants permettra d'atteindre les cibles fixées.
Sans ces subventions, faut-il redouter une forte hausse de la facture pour les locataires ?
Les locataires subissent d'une part des ajustements de loyers en raison de la (trop) faible répercussion des coûts des travaux, et d'autre part, ils paient les factures liées aux charges de chauffage, à la production d'eau chaude et aux autres frais accessoires refacturables conformément au droit du bail. Une rénovation énergétique permet d'améliorer l'efficacité énergétique des bâtiments, ce qui entraîne une baisse de la consommation d'énergie et, par conséquent, une diminution des charges.
Cependant, il est évident que la réduction ou la suppression des subventions aurait un impact direct sur le coût total des travaux à répercuter. L'adaptation des loyers serait alors calculée sur la base d'un montant de travaux plus élevé, entraînant des hausses de loyer plus conséquentes pour les locataires.
Est-ce que cela pourrait mettre en péril les objectifs de neutralité carbone de 2050 de la Suisse ?
Étant donné l'ampleur des investissements publics et privés nécessaires, je doute que nous puissions atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. Si la question des subventions est importante, il est clair que d'autres mesures seront indispensables pour atteindre cet objectif.
Bien que je sois habituellement favorable à la déréglementation et à une politique libérale, je suis convaincu que seule l'imposition de délais d'assainissement raisonnables mais contraignants permettra d'atteindre les cibles fixées.
Il me semble également que des solutions incitatives supplémentaires pourraient encourager les propriétaires à entreprendre les travaux requis sur leurs immeubles. Cela pourrait passer par des facilités de financement, une plus grande souplesse dans la répercussion des coûts des travaux sur les loyers, ou encore la mise en place d'un système de notation de durabilité pour valoriser les bâtiments rénovés.
En tant que propriétaires, quels seraient les autres obstacles subsistant pour atteindre cette neutralité carbone ?
J'en vois trois qui pourraient concrètement ralentir l’atteinte de la neutralité carbone :