Les conseils d’administration font face au challenge de la durabilité

« Il est essentiel que la durabilité soit traitée de manière transversale, et qu’elle soit prise en compte comme une priorité dans chaque décision stratégique de l’entreprise », explique Alban Bitz, directeur Suisse du bureau de conseil dss+ et membre du conseil d’administration de Sinergy.

Les conseils d’administration font face au challenge de la durabilité
Alban Bitz, directeur Suisse du bureau de conseil dss+ et membre du conseil d’administration de Sinergy.

Le 4 avril dernier, j’ai eu l’opportunité d’organiser et de modérer un débat organisé par dss+ et l’association Swiss Leaders. Consacré à la thématique de la durabilité au sein des conseils d’administration (CA), il s’est déroulé en compagnie d’Adèle Thorens Goumaz et de Sofia de Meyer. La première, bien connue pour son parcours politique et son rôle actuel de professeure à la Haute École d'ingénierie et de gestion du canton de Vaud, siège depuis un an au conseil d’administration d’Alpiq. Quant à Sofia de Meyer, fondatrice de Whitepod et de la marque de limonades Opaline, elle est membre du conseil de Romande Energie.

Au cours de cet échange, plusieurs pistes de réflexion ont émergé pour répondre à une question fondamentale : comment les enjeux de durabilité doivent-ils être intégrés puis assumés au sein des conseils d’administration ?

Tout d’abord, il apparaît que la notion de durabilité doive occuper une place centrale dans la stratégie d’un conseil d’administration, ou à tout le moins constituer l’un de ses piliers fondamentaux. Idéalement, elle devrait même être inscrite dans la raison d’être de l’entreprise. Sans cet ancrage, il devient particulièrement difficile, en période de crise, de s’appuyer sur la stratégie pour réaffirmer une direction claire.

Chez Romande Energie, Sofia de Meyer indique que cette notion de cap se traduit par l’objectif de guider l’entreprise vers la décarbonation de la Suisse romande d’ici 2040. Cet engagement est profondément ancré dans l’organisation même de l’entreprise. Ainsi, toute décision ou investissement qui s’en écarterait peinerait à trouver une légitimité interne. Concernant Alpiq, Adèle Thorens Goumaz explique que le groupe intègre également la préservation du climat dans sa raison d’être, aux côtés de la sécurité de l’approvisionnement, et s’est fixé pour ambition d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2040.

Il s’agit de considérer l’entreprise comme un acteur inséré dans un écosystème global, et non comme une entité isolée et cloisonnée.

Penser l’entreprise en écosystème

Lors de ce même débat, la notion de pensée systémique a été évoquée. Il s’agit de considérer l’entreprise comme un acteur inséré dans un écosystème global, et non comme une entité isolée et cloisonnée. En intégrant les différentes parties prenantes, il devient possible de créer un cadre d’action plus légitime et d’accélérer les processus de transformation ou de transition. Dans cette optique, le conseil d’administration peut être un moteur de cette pensée, en facilitant l’émergence de synergies autour d’intérêts communs.

Bien entendu, et cela relève de son mandat, un conseil d’administration doit veiller au respect des législations en vigueur et anticiper les risques. Mais il lui incombe également d’adopter une vision tournée vers l’avenir, de manière proactive et ouverte.

Avec les récentes décisions de l’Union européenne concernant la directive CSRD et son paquet OMNIBUS (proposition de modification datant du 26 février 2025), il devient crucial pour les entreprises de considérer le rapport de durabilité comme un véritable instrument stratégique, et non plus comme un simple outil de conformité ou de communication.

L’essentiel est que la durabilité soit traitée de manière transversale, et qu’elle soit prise en compte comme une priorité dans chaque décision stratégique de l’entreprise. La durabilité ne se limite pas à l’environnement : elle englobe également des dimensions sociales et économiques. Il s’agit ici de trois objectifs souvent complexes à concilier. Leur hiérarchisation doit se trouver au cœur des débats au sein des conseils d’administration.

Toute transformation durable repose sur l’engagement quotidien de l’ensemble des collaborateurs et collaboratrices, dans la diversité de leurs métiers.

Fédérer tous les collaborateurs

Pour Adèle Thorens Goumaz tout comme pour Sofia de Meyer, il est essentiel que la durabilité soit érigée en valeur centrale, capable de rassembler et de fédérer l’ensemble des acteurs d’une entreprise. De la même manière que la sécurité au travail unit les collaborateurs autour d’un objectif immédiat — préserver des vies —, l’entreprise devrait être en mesure de faire de la protection des écosystèmes un objectif partagé et fédérateur.

Quelle satisfaction de pouvoir se dire : « Aujourd’hui, j’ai contribué à faire de mon entreprise une entreprise responsable, en respectant mes collègues, mes partenaires, tout en veillant aux impacts de nos activités sur les écosystèmes terrestres. »

C’est ici que la notion d’individu prend tout son sens. Car toute transformation durable repose sur l’engagement quotidien de l’ensemble des collaborateurs et collaboratrices, dans la diversité de leurs métiers. Pour réussir, il est indispensable de rendre la stratégie opérationnelle, et c’est dans cette perspective que nous avons abordé la nécessité d’établir une véritable courroie de transmission entre le conseil d’administration et le comité de direction. En effet, une décision ne prend tout son sens que si elle est effectivement mise en œuvre.

Dans cette optique, il paraît judicieux d’impliquer régulièrement les membres des comités de direction dans les séances du conseil d’administration. Cette collaboration soutenue permet non seulement de garantir une communication fluide, mais aussi de favoriser l’intégration des points de vue et des expertises diverses. La formation constitue par ailleurs un levier privilégié par de nombreuses entreprises, afin d’aligner les connaissances, et ainsi permettre à chacun d’initier son propre chemin vers une transformation durable.

Il ne fait aucun doute que, face aux défis majeurs auxquels est confronté le secteur de l’énergie, le rôle du conseil d’administration est plus crucial que jamais : il doit porter une vision durable et constructive de l’avenir de l’entreprise, centrée sur l’humain, qui s’aligne et agit en cohérence avec une direction et des objectifs communs.

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